Par où commencer ?
Par cette remarque en séance publique du Conseil Communal du chef de groupe du principal parti d'opposition à propos de mes « trucs pour bobos » que sont mes multiples projets d'agriculture urbaine ?
Par cette note du livre « Tout peut changer », de Naomi Klein, à propos du réchauffement climatique, qui rappelait que durant la seconde guerre mondiale, les londoniens produisaient 40 % de leurs légumes ?
Je préfère vous décrire d'où je parle. Je me trouve sur un lopin de terre, au milieu de petites parcelles de potagers. Ce lopin de terre est coincé derrière des bâtiments des logements sociaux du Foyer du Sud, anciennement Foyer forestois, que j'ai présidé quatre années durant, de début 2009 à début 2013. Ces logements sociaux font partie d'une Cité Jardin, une utopie concrète du début du 20ème siècle. Cette société de logements sociaux a été créée en 1911, année de naissance de mon grand-père paternel, à une époque où on devenait facilement orphelin.
Jusqu'il y a peu, là où je me trouve, s'érigeaient encore de vieux garages désaffectés, en ruine.
« C'est incroyable comme la parcelle d'un ancien garage convient bien pour une parcelle de jardin » m'a t-on dit. Symbole d'une époque qui est en train de changer, d'une parenthèse qui n'aura duré que quelques dizaines d'années, durant laquelle nous crûmes que les légumes ne pouvaient venir que de barquettes emballées sous cellophanes, disponibles dans une grande surface à la périphérie de la ville.
Nous sommes en début d'automne, il fait gris et un peu pluvieux. Pourtant, les visages sont souriants, simplement souriants. Nous sommes entourés du travail des gens qui m'accueillent. Les habitants du quartier, certains locataires sociaux, d'autres propriétaires de ces anciennes maisons ouvrières de la Cité Jardin.
On a envie de dire « Félicitez-les car ils ne savent pas ce qu'ils font ».
Que font-ils ?
Ils participent à un projet monté par le service communal de l'environnement, par le Foyer du Sud et par l'association qui travaille pour le plan de cohésion sociale local. Car voyez-vous, un tel projet ne tombe pas du ciel. Il nécessite de l'énergie, une belle intelligence de ces travailleurs, de la compétence technique et sociale pour que tout ce petit monde tienne ensemble.
Le projet n'a pas été conçu comme collectif au départ. Le collectif, c'est pourtant essentiel, mais il est porteur de la reproduction des dominations, même involontaires.
Il a été conçu autour de la notion du partage d'une même terre. Sans faire de bruit. Sans ruban à couper ni discours d'inauguration. Et le collectif émerge tout seul. L'un amène ses outils et fabrique des bancs à partir de palettes récupérées. Les autres s'affairent autour de leurs plantations ou servent un verre. On me présente un morceau de tortilla : « les oignons et les pommes de terre viennent de la parcelle là ! ». Ça, c'est du circuit court, coco !
Voyant les meubles en palettes, je risque la blague : « Et comment ferons-nous lorsque tout sera en circuit court et qu'il n'y aura plus de palettes ? » On me répond que les chaînes de magasins de bricolage vendent déjà de vraies-fausses palettes ! Même la récup peut être vendue...
Je ne suis ni à l'épicentre d'une révolution en devenir ni au milieu de chantres des « petits gestes pour sauver la planète ». Je suis simplement entouré de gens qui se sauvent eux-mêmes, qui prennent plaisir à se réapproprier un peu de leur alimentation et à travailler ensemble à la même chose et, surtout, apprennent que ce qui les sépare est infiniment moins important que ce qu'ils ont en commun, d'où qu'ils viennent, quel que soit leur arbre généalogique ou quel que soit ce qui est sacré pour eux.
Par cette remarque en séance publique du Conseil Communal du chef de groupe du principal parti d'opposition à propos de mes « trucs pour bobos » que sont mes multiples projets d'agriculture urbaine ?
Par cette note du livre « Tout peut changer », de Naomi Klein, à propos du réchauffement climatique, qui rappelait que durant la seconde guerre mondiale, les londoniens produisaient 40 % de leurs légumes ?
Je préfère vous décrire d'où je parle. Je me trouve sur un lopin de terre, au milieu de petites parcelles de potagers. Ce lopin de terre est coincé derrière des bâtiments des logements sociaux du Foyer du Sud, anciennement Foyer forestois, que j'ai présidé quatre années durant, de début 2009 à début 2013. Ces logements sociaux font partie d'une Cité Jardin, une utopie concrète du début du 20ème siècle. Cette société de logements sociaux a été créée en 1911, année de naissance de mon grand-père paternel, à une époque où on devenait facilement orphelin.
Jusqu'il y a peu, là où je me trouve, s'érigeaient encore de vieux garages désaffectés, en ruine.
« C'est incroyable comme la parcelle d'un ancien garage convient bien pour une parcelle de jardin » m'a t-on dit. Symbole d'une époque qui est en train de changer, d'une parenthèse qui n'aura duré que quelques dizaines d'années, durant laquelle nous crûmes que les légumes ne pouvaient venir que de barquettes emballées sous cellophanes, disponibles dans une grande surface à la périphérie de la ville.
Nous sommes en début d'automne, il fait gris et un peu pluvieux. Pourtant, les visages sont souriants, simplement souriants. Nous sommes entourés du travail des gens qui m'accueillent. Les habitants du quartier, certains locataires sociaux, d'autres propriétaires de ces anciennes maisons ouvrières de la Cité Jardin.
On a envie de dire « Félicitez-les car ils ne savent pas ce qu'ils font ».
Que font-ils ?
Ils participent à un projet monté par le service communal de l'environnement, par le Foyer du Sud et par l'association qui travaille pour le plan de cohésion sociale local. Car voyez-vous, un tel projet ne tombe pas du ciel. Il nécessite de l'énergie, une belle intelligence de ces travailleurs, de la compétence technique et sociale pour que tout ce petit monde tienne ensemble.
Le projet n'a pas été conçu comme collectif au départ. Le collectif, c'est pourtant essentiel, mais il est porteur de la reproduction des dominations, même involontaires.
Il a été conçu autour de la notion du partage d'une même terre. Sans faire de bruit. Sans ruban à couper ni discours d'inauguration. Et le collectif émerge tout seul. L'un amène ses outils et fabrique des bancs à partir de palettes récupérées. Les autres s'affairent autour de leurs plantations ou servent un verre. On me présente un morceau de tortilla : « les oignons et les pommes de terre viennent de la parcelle là ! ». Ça, c'est du circuit court, coco !
Voyant les meubles en palettes, je risque la blague : « Et comment ferons-nous lorsque tout sera en circuit court et qu'il n'y aura plus de palettes ? » On me répond que les chaînes de magasins de bricolage vendent déjà de vraies-fausses palettes ! Même la récup peut être vendue...
Je ne suis ni à l'épicentre d'une révolution en devenir ni au milieu de chantres des « petits gestes pour sauver la planète ». Je suis simplement entouré de gens qui se sauvent eux-mêmes, qui prennent plaisir à se réapproprier un peu de leur alimentation et à travailler ensemble à la même chose et, surtout, apprennent que ce qui les sépare est infiniment moins important que ce qu'ils ont en commun, d'où qu'ils viennent, quel que soit leur arbre généalogique ou quel que soit ce qui est sacré pour eux.